Cette année, c’est la vingt-quatrième édition du festival.
Archie Shepp a 88 ans. Aldo Romano, 84.
John Coltrane et Miles Davis auraient eu 99 ans. Frantz Fanon et Gilles Deleuze, cent.
En 2002, quand le festival a vu le jour, certains des musiciens invités aujourd’hui n’étaient pas encore nés. D’autres rêvaient, adolescents, dans les rues de Bamako, de Paris, d’Addis-Abeba ou de Londres. Désormais, ils jouent ici, entre mer et ciel, dans cette extraordinaire sentinelle de pierre. Construit pour repousser l’ennemi, le Fort Sainte-Agathe accueille désormais les voix du monde. Il est devenu un phare immobile, qui éclaire sans imposer. On y entend les petits enfants d’Archie Shepp, de Coltrane et de Sun Râ. On y entend le monde entier.
Ce festival repose sur un désir. De musique, de liberté, et de Porquerolles (le nom du paradis, pour nous). « On croit que c’est autre chose qui sauve les gens : le devoir, l’honnêteté, être bon, être juste. Non. Ce sont les désirs qui vous sauvent. Ils sont la seule chose vraie. » (Baricco.- Océan mer). A l’heure où nous écrivons ces lignes, nous mesurons la fragilité de cette équation, qui dure depuis 23 ans. Dans un paysage dominé par les géants du divertissement, où les coûts explosent, où les festivals indépendants vacillent, Jazz à Porquerolles fait figure d’anomalie. Ou de miracle.
Ce miracle a lieu cette année encore grâce à vous, grâce à l’énergie d’une poignée de passionnés, et à nos partenaires publics et privés qui continuent de croire qu’un peu de beauté partagée peut éclairer le monde. Ici, au large du monde, vous défendez une idée rare : celle d’un art ouvert comme l’horizon, qui relie les âmes plutôt qu’il ne les dresse l’une contre l’autre — une certaine manière d’habiter le monde.
L’équipe du festival